Abououoba

Abououoba

REFORMES POLITIQUES AU BURKINA : Où va-t-on réellement ?

REFORMES POLITIQUES AU BURKINA : Où va-t-on réellement ?

Beaucoup croyaient être enfin au terminus. Mais le train de la réflexion sur les réformes politiques au Burkina devra continuer à rouler sans que l’on sache exactement où il s’arrêtera. En effet, à la clôture des assises nationales sur les réformes politiques, le président du Faso, Blaise Compaoré, a demandé à ses compatriotes de poursuivre la réflexion sur les sujets qui n’ont pas fait l’objet de consensus. Certes, dans la vie d’un individu comme dans celle d’une nation, on ne peut raisonnablement nier le caractère dynamique des aspirations, y compris celles de nature politique. Ce qui est nécessaire aujourd’hui, peut se révéler sans grand intérêt demain, et ce qui est superflu présentement, peut constituer un centre d’intérêt dans le futur.

En cela, la réflexion doit être permanente pour permettre aux nations et aux individus d’être toujours en phase avec leurs aspirations et leurs actions. Mais un danger réel menace celui qui ne rationnalise pas son activité de réflexion : l’indécision et par voie de conséquence, l’inaction. Il faut s’en prémunir. En effet, il ne faut pas que cette réflexion nationale qui procède d’une volonté du pays de se doter, in fine, d’une vision prospective consensuelle, soit un obstacle à l’action présente. Au contraire, étant donné que les points d’accord sont dégagés et bien connus, il y a lieu d’agir, quitte à intégrer d’éventuels correctifs au cours de cette action, en fonction des réalités qui peuvent naître ou se révéler au fil du temps.

Mais les conclusions des consultations nationales ne semblent pas emballer leurs initiateurs. D’où cette impression qu’elles ne sont pas satisfaisantes pour les tenants du pouvoir. On sait déjà qu’à l’ouverture des assises nationales, certains groupes proches du pouvoir ont tenté de modifier les règles du jeu en essayant de remplacer la règle du consensus par celle de la majorité. Ce que les autres parties prenantes n’ont pas manqué de rejeter. Dans ces conditions, difficile de se convaincre de la bonne foi du CDP qui, visiblement, a été piégé dans son propre jeu. Il n’est un secret pour personne que l’article 37 constitue un enjeu majeur et que le CDP aurait jubilé si les délégués dans les régions ou au cours des assises nationales, avaient appelé, à l’unanimité ou, à tout le moins par consensus, à le réviser.

Mais autres temps, autres mœurs : les participants, que certains observateurs présumaient tous acquis au pouvoir en place, ont probablement œuvré à démentir cette impression. En témoigne du reste leur position sur l’article 37 de la loi fondamentale burkinabè : ils se sont battus et c’est tout à leur honneur, pour que cet article 37 qui consacre, dans son esprit, le principe de l’alternance à la présidence du Faso, ne bascule pas dans le champ des sujets consensuels. Ces gens-là auront, d’une manière ou d’une autre, joué leur partition et ont même crédibilisé un tant soit peu ces consultations sur les réformes politiques que d’aucuns craignaient de voir se transformer en pures cérémonies d’allégeance au locataire de Kosyam.

En tous les cas, les réformes sont urgentes et il faut y aller du moment où les consultations ont permis de s’entendre sur quelque chose. Car, les tergiversations constatées sont de nature à donner raison à l’opposition politique légale et à une bonne partie de la société civile qui avaient vu dans ces consultations, du cirque, de la poudre aux yeux. Cette manie de jouer les prolongations sans que cela soit nécessaire, ressemble étrangement, à une façon de tourner en rond, à une volonté d’avoir les contestataires à l’usure. Mais cette stratégie semble hasardeuse au regard du contexte international et même de certaines réalités internes. En effet, un indice et non des moindres est que, concernant l’article qui fâche, la division se constate même au sein de la majorité présidentielle où certains ne font pas mystère de leur opposition à toute velléité de révision de cette disposition constitutionnelle.

Visiblement, il ne reste plus que la décision finale du président Compaoré. Il est le seul à pouvoir situer le peuple sur ses vraies intentions. Beaucoup de choses dépendront de sa décision. Et, le président et ses fidèles lieutenants ne devraient pas perdre de vue le fait qu’à trop s’amuser avec le feu, on finit par se brûler. Le suspense entretenu par le chef de l’Etat à travers son refus de se prononcer sur le sort réservé à l’article 37, n’est pas de nature à rassurer, du moins pas à faire baisser le mercure sur la scène politique et même au-delà. Les supputations vont bon train. Dame rumeur court et colporte son lot de questionnements et d’incertitudes du lendemain.

Et, il faut le dire, cela ne crée pas un environnement propice à un apaisement. Le vin étant tiré, il ne reste plus qu’à le boire. Il faut mettre en œuvre ces conclusions consensuelles des parties prenantes à la concertation sur les réformes politiques. Déclarer officiellement la nécessité de continuer la réflexion donne le désagréable sentiment d’une obstination à aboutir coûte que coûte à un plan B qui saute le verrou sacré de l’article 37.

« Le Pays »



12/01/2012
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 3 autres membres