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CCRP et article 37 : Faites vos jeux, rien ne va plus !

CCRP et article 37 : Faites vos jeux, rien ne va plus !

vendredi 25 novembre 2011

Querellé par les uns et applaudi par les autres par rapport à son opportunité, le Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP) achèvera sa course dans deux semaines par des « assises nationales » prévues les 8 et 9 décembre pour regrouper 1 500 délégués des partis politiques et des différentes « forces vives de la nation ». Que faut-il attendre de cette rencontre que certaines langues fourchues qualifient déjà de « foire », surtout en ce qui concerne le sort qui sera réservé au très polémique article 37 de la Constitution burkinabè, limitant le mandat présidentiel à « un mandat renouvelable une seule fois » ? Telle est probablement la vraie -voire la véritable- question qui mérite d’être posée.

En effet, alors que cette question est apparue sans objet à l’issue des premières rencontres du CCRP tenues en juillet dernier, les partisans du déverrouillage ont tenu à la maintenir dans l’agenda des assises régionales qui se sont déroulées en octobre. Principal concerné par le sujet, le Blaiso national ne l’a pas moins esquissé en laissant persister le suspense jusqu’au bout. Les anti-déverrouillage de l’article 37 redoutaient surtout un jeu flou dans les régions. Mais visiblement, il y a eu plus de peur que de mal. Les différentes délégations invitées à discuter des réformes politiques qui faisaient tant jaser à Simonville se sont inscrites aux antipodes des préoccupations intellectualistes qui agitaient la capitale.

Elles, elles voulaient du concret, comme « l’augmentation des salaires », « la construction d’infrastructures », ou encore des besoins bassement matériels, pour parler trivialement. En dehors d’une marche de protestation contre la modification du fameux article organisée par les militants de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) à Gombousgou, on peut dire qu’il n’y avait rien au village. En tout cas, pas de quoi fouetter un chat. On n’est donc pas plus avancé que les conclusions des premières assises. En clair, il n’y a pas eu plus de consensus que de dissensus autour de la question. Tous les regards sont tournés vers le Palais des sports de Ouaga 2000 où le dernier round des discussions est attendu dans quelques jours. Mais qu’est-ce qui peut bien sortir de seulement 48 heures d’assises auxquelles sont conviées 1 500 personnes ?

A priori, pas grand-chose. En tout cas, au regard du nombre des partisans et du temps qui leur est imparti pour dégager un éventuel consensus autour du déverrouillage de l’article 37, on ne devrait rien craindre. Du reste, il est pratiquement impossible de laisser parler convenablement les délégués ou même les différentes composantes sans faire entorse aux règles élémentaires de discussions et de dialogue constructif. La discussion étant l’élément fondamental pour parvenir au consensus, on peut présager qu’il y a de fortes chances que le débat sur la modification ou non de l’article querellé soit biaisé.

A moins que ceux qui tiennent mordicus à voir réalisé l’objectif du déverrouillage ne choisissent, en désespoir de cause, de procéder à un forcing. L’opposition statutaire et une bonne partie des organisations de la société ayant persisté et signé de ne pas tremper leurs barbichettes dans la soupe du CCRP, on peut craindre de n’avoir que des délégués acquis à la cause de la levée du dispositif limitant le mandat présidentiel. Dans ce cas, il leur suffira d’adopter le déverrouillage par acclamation et le tour sera joué. Mais pour quelle crédibilité pour le bénéficiaire de ce passage en force qui est le Blaiso national ?

Il est évident que la situation internationale actuelle n’est pas favorable à ce genre de gymnastique politique. En tout cas, il sera difficile de convaincre l’opinion publique internationale de cette forfaiture politique. On peut même se permettre de croire que les autorités burkinabè sont bien payées pour se permettre de nouvelles convulsions sociopolitiques alors que le pays n’a pas encore fini de panser les plaies de la crise du premier semestre.

L’autre alternative des révisionnistes de l’article 37 serait de chercher à gagner du temps en faisant l’option d’un référendum pour trancher la question. Là également, ils seront d’autant plus mal barrés qu’il faudrait attendre d’avoir un fichier électoral fiable pour organiser un tel scrutin. Des experts de l’Organisation internationale de la Francophonie commis par le gouvernement burkinabè ayant désormais fait le constat que le fichier électoral burkinabè ne peut pas garantir des élections crédibles, le Burkina s’interdit du coup d’organiser quelle que consultation que ce soit avant de rectifier le tir. Pendant ce temps, le mandat actuel du Blaiso national arrivera pratiquement à la veille de son terme. Et cela rendrait la modification très intéressée, et donc suspecte.

Majoritairement acquis au parti au pouvoir, le Parlement aurait pu être mis à contribution pour sauter le verrou limitatif du mandat présidentiel. Mais là également, l’opération risque d’être d’autant plus suspecte que la législature actuelle est pratiquement en fin de mandat. Pour ces députés qui sont à quelques mois de remettre en jeu leur mandat, ce serait courir le risque de se discréditer aux yeux d’une partie de leur électorat que de se livrer à ce jeu de déverrouillage forcé d’un article qui n’a pas fait l’objet de consensus national.

En fin de compte, on peut dire qu’il y a très peu de marge de manœuvre pour sauter le verrou de la limitation du mandat présidentiel. Du moins en théorie. Mais ceux qui y tiennent peuvent toujours continuer à faire leurs jeux. On sait désormais quels sont les éventuels chemins qu’ils vont emprunter et surtout par quelle gymnastique ils peuvent essayer de reprendre la main.

F. Quophy

Journal du Jeudi



04/12/2011
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