Abououoba

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Conclusions du CCRP : Cynisme, légèreté grave ou fuite en avant ?

Conclusions du CCRP : Cynisme, légèreté grave ou fuite en avant ?

jeudi 27 octobre 2011

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Le Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP du 23 juin au 14 juillet a terminé ses travaux dont les conclusions consignées dans un rapport ont été remises au Président du Faso. A regarder le volume des propositions et l’effort de toilettage, il y a lieu de féliciter sincèrement le CCRP.

“Du 18 au 26 octobre, les régions se pencheront à leur tour sur ces propositions. Libre à elles de faire des amendements et d’autres propositions.

D’ores et déjà, là où le bât blesse et qui pourrait entretenir une sclérose viscérale de la vie publique, c’est l’immunité accordée aux chefs d’Etat de 1960 à nos jours sans accorder aussi une amnistie pour les crimes de sang en politique concernant la même période. L’amnistie, selon le dictionnaire Encyclopédique Larousse est « une loi qui fait disparaître le caractère d’infraction d’un fait punissable en effaçant la condamnation ou en empêchant ou en arrêtant les poursuites ». Dans notre contexte, sans minimiser la révision de certains articles de la Constitution, on peut dire que la résolution de la question de l’immunité et de l’amnistie demeure primordiale pour dénouer le nœud gordien dans la révision de la Constitution.

Même si l’amnistie pénale est du ressort du président du Faso ou de l’Assemblée nationale par décret ou loi, l’on pourrait inscrire également à titre exceptionnel dans la Constitution l’amnistie pour les crimes de sang en politique jugés ou non de l’indépendance jusqu’à nos jours, car comme le dit l’adage, « on n’enterre pas un cadavre en laissant les pieds dehors ». Ceci est d’autant plus vrai qu’aucun chef d’Etat de 1960 à nos jours n’a été accusé d’avoir tué de ses propres mains.

Mais l’immunité et l’amnistie n’excluent pas les réparations pour aboutir à la paix des braves, conditions sine qua non pour une démocratie apaisée pouvant souffrir une alternance (selon le sens de chacun) par le jeu démocratique.

Immunité jusqu’à nos jours

A beau épiloguer sur l’expression, il faut reconnaître qu’elle est sujet à caution et fait froid dans le dos. Elle entretient un flou périlleux pour le peuple, la Nation, et est en contradiction flagrante avec l’esprit de la Journée du Pardon ainsi que les déclarations du Président du Faso à cette occasion.

Le président du Faso à l’occasion et en substance a demandé pardon pour tous les crimes de sang commis sous les différents régimes jusqu’à cette date au nom de chaque président. Il y a laissé entendre que « plus jamais çà ». Naturellement, la période couverte par l’immunité accordée aux chefs d’Etat devrait courir donc jusqu’à la date de la Journée du pardon, c’est-à-dire le 31 mai 2001. Accorder par consensus l’immunité jusqu’à nos jours peut prêter à confusion et permettre ou accorder en sous entendu au Président du Faso un droit de crime de sang en tout lieu sur le territoire national et sur tout Burkinabè jusqu’à nos jours, c’est-à-dire jusqu’à la date d’application de la Constitution révisée et peut-être même au-delà, selon certaines interprétations de « jusqu’à nos jours ». Ce serait un grand et cruel privilège auquel le chef de l’Etat lui-même aurait déjà renoncé lors de la Journée du pardon en disant « plus jamais çà ».

Voilà pourquoi, le CCRP composé de personnalités de haut niveau, de haut rang et/ou pétries d’expériences devrait, à mon sens, circonscrire clairement et raisonnablement la période couverte par l’immunité accordée aux chefs d’Etat au risque d’inciter à travers un flou à prolonger “jusqu’à nos Jour”, ce que nous avons décrié et regretté tous. Le CCRP a été clair et précis sur plusieurs propositions consensuelles, pourquoi pas sur celles de la période couverte par l’immunité. Est-ce du cynisme, une légèreté grave, ou une fuite en avant ? Là est la question.

L’amnistie pour la paix

Par ailleurs, ce fut une surprise de constater que le CCRP n’ait pas retenu consensuellement l’amnistie pour les crimes de sang en politique sous les différents régimes. Est-ce à dire que l’opposition radicale composée pour la plupart de membres qui ont collaboré avec les différents régimes d’exception (Front populaire, CNR, CSP …etc.) et qui ont participé aux travaux ou fait des propositions ont décidé de se faire hara-kiri pour pouvoir abattre les “chiens du maître” ? En tous cas, même eux pourraient répondre également au tribunal de l’histoire pour crime de sang en politique à certaines époques, au nom de la collégialité du pouvoir. Est-ce à dire également que les représentants des communautés religieuses et coutumières, les partis de la mouvance présidentielle et les partis qui soutiennent la candidature de Blaise Compaoré se sont dédits par rapport à la Journée du pardon en n’accordant pas l’amnistie aux crimes de sang en politique sous les différents régimes ?

A ces questions, on est tenté évidemment de répondre par la négative, puisque les uns pourraient avoir besoin d’amnistie pour eux-mêmes, et les autres soit ont participé soit ont assisté à la Journée du Pardon à laquelle ils ont donné leur caution par leur présence. Quant au CDP, de toute évidence, il ne peut que s’inscrire naturellement dans l’esprit du Président du Faso, c’est-à-dire le pardon qui doit conduire tout droit vers l’amnistie pour tous les crimes de sang en politique. Au regard de ces réalités, on ne pouvait qu’obtenir une large majorité, c’est-à-dire un consensus en faveur de l’amnistie pour les crimes de sang en politique de 1960 jusqu’à la date de la Journée du pardon. Je dis consensus en tant que large majorité car il pourrait exister des partis clandestins pour s’y opposer. On ne saurait en tenir compte puisque ces partis n’existent pas officiellement. Cependant, certains de leurs membres peuvent être des militants dans certains pans des organisations apolitiques de la société civile mais ne peuvent influer sensiblement sur les décisions consensuelles compte tenu de la large représentativité du CCRP.

Accorder l’amnistie aux crimes de sang, loin de vouloir être une culture de l’impunité devrait être perçu plutôt comme une volonté de pardonner pour sauvegarder la paix sociale et faire triompher la démocratie. Dans le cas contraire, l’image qui me vient en tête, c’est l’image d’une paix que l’on signe avec un général d’armée sans que cette paix ne concerne la troupe ou ses compagnons d’armes. Que pensez-vous qu’il puisse arriver ? C’est une discrimination lourde de sens et de conséquence. L’instinct de conservation qui peut en découler, pourrait nous amener les scénari les plus catastrophiques que personne n’aurait souhaité, voire mettre à plat la Constitution et ses réformes.

Alors, ne pas retenir l’amnistie pour les crimes de sang passés en politique pourrait être mal compris. De nos jours, pour une démocratie apaisée, sans minimiser la révision de certains articles de la Constitution, la question primordiale demeure la bonne résolution de la problématique de l’immunité et de l’amnistie dans le processus du Pardon. Dans ce sens, l’objectif final serait d’extirper à jamais tous les vieux démons qui dorment en nous pour qu’ils ne se réveillent et ne troublent à jamais la paix au Burkina Faso, car si jamais, si jamais... Cette paix doit être la base d’une vraie démocratie dans le pays sans passion ni haine mais avec repentir.

Une diplomatie efficiente

La question de l’immunité et de l’amnistie résolue, nos éminents juristes devraient alors en tenir compte et faire en sorte qu’aucune immunité ou amnistie accordée par consensus et entérinée par suffrage universel ne soit remise en cause au plan national ou international. A ce niveau l’immunité et l’amnistie devront bénéficier en quelque sorte de l’autorité de la chose jugée. A l’image de l’Afrique du Sud avec Monseigneur Desmond Tutu, il restera à nos sages de grande notoriété internationale de faire entendre nos voix à ce sujet dans le reste du monde. Puisque les réflexions sur les révisions de la Constitution se poursuivront dans les régions et sur le plan national, cette contribution, loin de vouloir heurter qui que ce soit, veut attirer l’attention sur certaines questions. Si ces questions sont mal résolues elles pourraient nous empêcher, majorité au pouvoir comme opposition, d’atteindre nos objectifs dans la paix, la sérénité avec un grand fond de pardon. C’est parfois difficile et douloureux de pardonner, mais le pardon relève d’une grandeur d’âme chez les croyants. Aussi, le Pardon ouvre beaucoup de portes.

Bakary Alexandre Sanou

L’Observateur Paalga

jeudi 27 octobre 2011

Le Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP du 23 juin au 14 juillet a terminé ses travaux dont les conclusions consignées dans un rapport ont été remises au Président du Faso. A regarder le volume des propositions et l’effort de toilettage, il y a lieu de féliciter sincèrement le CCRP.

“Du 18 au 26 octobre, les régions se pencheront à leur tour sur ces propositions. Libre à elles de faire des amendements et d’autres propositions.

D’ores et déjà, là où le bât blesse et qui pourrait entretenir une sclérose viscérale de la vie publique, c’est l’immunité accordée aux chefs d’Etat de 1960 à nos jours sans accorder aussi une amnistie pour les crimes de sang en politique concernant la même période. L’amnistie, selon le dictionnaire Encyclopédique Larousse est « une loi qui fait disparaître le caractère d’infraction d’un fait punissable en effaçant la condamnation ou en empêchant ou en arrêtant les poursuites ». Dans notre contexte, sans minimiser la révision de certains articles de la Constitution, on peut dire que la résolution de la question de l’immunité et de l’amnistie demeure primordiale pour dénouer le nœud gordien dans la révision de la Constitution.

Même si l’amnistie pénale est du ressort du président du Faso ou de l’Assemblée nationale par décret ou loi, l’on pourrait inscrire également à titre exceptionnel dans la Constitution l’amnistie pour les crimes de sang en politique jugés ou non de l’indépendance jusqu’à nos jours, car comme le dit l’adage, « on n’enterre pas un cadavre en laissant les pieds dehors ». Ceci est d’autant plus vrai qu’aucun chef d’Etat de 1960 à nos jours n’a été accusé d’avoir tué de ses propres mains.

Mais l’immunité et l’amnistie n’excluent pas les réparations pour aboutir à la paix des braves, conditions sine qua non pour une démocratie apaisée pouvant souffrir une alternance (selon le sens de chacun) par le jeu démocratique.

Immunité jusqu’à nos jours

A beau épiloguer sur l’expression, il faut reconnaître qu’elle est sujet à caution et fait froid dans le dos. Elle entretient un flou périlleux pour le peuple, la Nation, et est en contradiction flagrante avec l’esprit de la Journée du Pardon ainsi que les déclarations du Président du Faso à cette occasion.

Le président du Faso à l’occasion et en substance a demandé pardon pour tous les crimes de sang commis sous les différents régimes jusqu’à cette date au nom de chaque président. Il y a laissé entendre que « plus jamais çà ». Naturellement, la période couverte par l’immunité accordée aux chefs d’Etat devrait courir donc jusqu’à la date de la Journée du pardon, c’est-à-dire le 31 mai 2001. Accorder par consensus l’immunité jusqu’à nos jours peut prêter à confusion et permettre ou accorder en sous entendu au Président du Faso un droit de crime de sang en tout lieu sur le territoire national et sur tout Burkinabè jusqu’à nos jours, c’est-à-dire jusqu’à la date d’application de la Constitution révisée et peut-être même au-delà, selon certaines interprétations de « jusqu’à nos jours ». Ce serait un grand et cruel privilège auquel le chef de l’Etat lui-même aurait déjà renoncé lors de la Journée du pardon en disant « plus jamais çà ».

Voilà pourquoi, le CCRP composé de personnalités de haut niveau, de haut rang et/ou pétries d’expériences devrait, à mon sens, circonscrire clairement et raisonnablement la période couverte par l’immunité accordée aux chefs d’Etat au risque d’inciter à travers un flou à prolonger “jusqu’à nos Jour”, ce que nous avons décrié et regretté tous. Le CCRP a été clair et précis sur plusieurs propositions consensuelles, pourquoi pas sur celles de la période couverte par l’immunité. Est-ce du cynisme, une légèreté grave, ou une fuite en avant ? Là est la question.

L’amnistie pour la paix

Par ailleurs, ce fut une surprise de constater que le CCRP n’ait pas retenu consensuellement l’amnistie pour les crimes de sang en politique sous les différents régimes. Est-ce à dire que l’opposition radicale composée pour la plupart de membres qui ont collaboré avec les différents régimes d’exception (Front populaire, CNR, CSP …etc.) et qui ont participé aux travaux ou fait des propositions ont décidé de se faire hara-kiri pour pouvoir abattre les “chiens du maître” ? En tous cas, même eux pourraient répondre également au tribunal de l’histoire pour crime de sang en politique à certaines époques, au nom de la collégialité du pouvoir. Est-ce à dire également que les représentants des communautés religieuses et coutumières, les partis de la mouvance présidentielle et les partis qui soutiennent la candidature de Blaise Compaoré se sont dédits par rapport à la Journée du pardon en n’accordant pas l’amnistie aux crimes de sang en politique sous les différents régimes ?

A ces questions, on est tenté évidemment de répondre par la négative, puisque les uns pourraient avoir besoin d’amnistie pour eux-mêmes, et les autres soit ont participé soit ont assisté à la Journée du Pardon à laquelle ils ont donné leur caution par leur présence. Quant au CDP, de toute évidence, il ne peut que s’inscrire naturellement dans l’esprit du Président du Faso, c’est-à-dire le pardon qui doit conduire tout droit vers l’amnistie pour tous les crimes de sang en politique. Au regard de ces réalités, on ne pouvait qu’obtenir une large majorité, c’est-à-dire un consensus en faveur de l’amnistie pour les crimes de sang en politique de 1960 jusqu’à la date de la Journée du pardon. Je dis consensus en tant que large majorité car il pourrait exister des partis clandestins pour s’y opposer. On ne saurait en tenir compte puisque ces partis n’existent pas officiellement. Cependant, certains de leurs membres peuvent être des militants dans certains pans des organisations apolitiques de la société civile mais ne peuvent influer sensiblement sur les décisions consensuelles compte tenu de la large représentativité du CCRP.

Accorder l’amnistie aux crimes de sang, loin de vouloir être une culture de l’impunité devrait être perçu plutôt comme une volonté de pardonner pour sauvegarder la paix sociale et faire triompher la démocratie. Dans le cas contraire, l’image qui me vient en tête, c’est l’image d’une paix que l’on signe avec un général d’armée sans que cette paix ne concerne la troupe ou ses compagnons d’armes. Que pensez-vous qu’il puisse arriver ? C’est une discrimination lourde de sens et de conséquence. L’instinct de conservation qui peut en découler, pourrait nous amener les scénari les plus catastrophiques que personne n’aurait souhaité, voire mettre à plat la Constitution et ses réformes.

Alors, ne pas retenir l’amnistie pour les crimes de sang passés en politique pourrait être mal compris. De nos jours, pour une démocratie apaisée, sans minimiser la révision de certains articles de la Constitution, la question primordiale demeure la bonne résolution de la problématique de l’immunité et de l’amnistie dans le processus du Pardon. Dans ce sens, l’objectif final serait d’extirper à jamais tous les vieux démons qui dorment en nous pour qu’ils ne se réveillent et ne troublent à jamais la paix au Burkina Faso, car si jamais, si jamais... Cette paix doit être la base d’une vraie démocratie dans le pays sans passion ni haine mais avec repentir.

Une diplomatie efficiente

La question de l’immunité et de l’amnistie résolue, nos éminents juristes devraient alors en tenir compte et faire en sorte qu’aucune immunité ou amnistie accordée par consensus et entérinée par suffrage universel ne soit remise en cause au plan national ou international. A ce niveau l’immunité et l’amnistie devront bénéficier en quelque sorte de l’autorité de la chose jugée. A l’image de l’Afrique du Sud avec Monseigneur Desmond Tutu, il restera à nos sages de grande notoriété internationale de faire entendre nos voix à ce sujet dans le reste du monde. Puisque les réflexions sur les révisions de la Constitution se poursuivront dans les régions et sur le plan national, cette contribution, loin de vouloir heurter qui que ce soit, veut attirer l’attention sur certaines questions. Si ces questions sont mal résolues elles pourraient nous empêcher, majorité au pouvoir comme opposition, d’atteindre nos objectifs dans la paix, la sérénité avec un grand fond de pardon. C’est parfois difficile et douloureux de pardonner, mais le pardon relève d’une grandeur d’âme chez les croyants. Aussi, le Pardon ouvre beaucoup de portes.

Bakary Alexandre Sanou

L’Observateur Paalga



28/10/2011
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