Abououoba

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Soulèvement des militaires: Les soldats de la MISAB pourraient aussi entrer dans la danse

Quand-est-ce que le Burkina sortira des troubles ? Et comment ? Bien malin celui qui pourrait prédire la fin des manifestations surtout pour ce qui concerne les mutineries au sein des forces armées. Même si on se laissait croire que la solution pour le retour à la paix passera par la distribution de l’argent, comme l’a voulu le président du Faso et également ministre de la dDéfense, la réalité aujourd’hui est qu’il va falloir en prévoir beaucoup et prendre en compte de très nombreux cas dans la société toute entière. Réussir un tel coup au Burkina, c’est réaliser une prouesse que même les Emirats-arabes et leurs pétrodollars n’oseraient pas tenter. A moins que... Toutes les garnisons militaires du pays se sont déjà soulevées et ont exprimé plus ou moins clairement leurs revendications. L’ensemble des corps, qu’ils soient militaires ou paramilitaires, se sont faits déjà entendre. En attendant de voir les réclamations entièrement soldées, on croyait la boucle bouclée dans l’armée. Eh bien ce n’est pas fini ! D’autres soulèvements pourraient intervenir dans les jours à venir si rien n’est fait pour anticiper. A en croire le soldat de 1ère classe à la retraite Dargani, le groupe de revendication auquel il appartient pourrait s’inscrire très bientôt dans la mouvance des mutineries en cours pour exiger la satifaction de leurs doléances qui traînent depuis 1998. Parlant au nom de ce groupe qu’il estime à environ trois cent soldats, l’ex-soldat révèle qu’ils sont enfin convaincus que seule la violence permet de résoudre les problèmes. Qui sont ces soldats qui menacent ? Le soldat de 1ère classe Dargani admis à la rétraite en 2008 et ses camarades ont appartenu au contingent burkinabè de la MISAB, la Mission Interafricaine de Surveillance des Accords de Bangui (Centrafrique). C’est en 1998 que l’Etat burkinabè les a choisis pour prendre part à la mission militaire visant à rétablir la paix en Centrafrique, pays alors sécoué depuis 1996 par une grave crise politco-militaire avec des répecusions sur le plan socio-économique. Revenus après 9 mois de mission (c’est le cas de Dargani) et ayant constaté que leurs primes étaient largement inférieurs à celles qui ont été distribuées à leurs homologues des autres pays africains membres de la MISAB, ils ont réclamé une révision de leur traitement financier à la hausse. La revendication n’avait pas eu de satisfaction et l’affaire a été portée en justice et s’y trouve jusqu’aujoud’hui. Les chances que la justice tranche favorablement sont quasi inexistantes selon Dargani. Or, au jour d’aujourd’hui chaque soldat burkinabè qui est allé risquer sa vie dans la forêt centrafricaine en terre inconnue, n’a obtenu en tout et pour tout que sept cent cinquante mille (750 000) FCFA. Pour les revendicateurs de l’ex-MISAB, c’est insultant au regard des responsabilités que chacun tient dans sa famille. C’est également incompréhensible si on voit que leurs camarades gabonais, maliens, tchadiens et autres ont eu beaucoup mieux qu’eux dans cette mission appuyée par la France. Convaincus qu’ils n’ont rien à espérer de l’action judiciaire, certainement rangée aux oubliettes, les soldats de l’ex-MISAB ne voudraient pas louper ce qu’ils estiment être une occasion offerte à eux de recouvrer le reliquat de leurs frais de missions. Ce soldat, la cinquantaine, estime que « les enfants leur ont montré la voie à suivre ». Lui et ses camarades envisagent aussi de se faire entendre bruyamment. L’Indépendant : Avez-vous des armes ? Notre interlocuteur : Attendez-voir ... L’Indépendant : Les autres mutins n’ont pas prévenu avant de se soulever. Pourquoi vous vous annoncez d’abord ? Notre interlocuteur : Nous voulons notre argent. Nous, on ne sortira pas pour piller des civils. Si on ne nous écoute pas, ils sauront que nous aussi on est là. L’air est sérieux quand le soldat Dargani se rappelle les conditions de la mission en Centrafrique et aussi la méchanceté de la hiérarchie militaire de l’époque qui aurait détourné leur argent. C’est pourquoi, il n’a cessé tout au long de l’entretien d’adresser ce message au président du Faso : « Je veux que Blaise dise aux colonels qui ont bouffé notre argent de le rembourser » - « Si on se lève contre ces colonels, ça ne sera pas bon pour eux », ajoute-t-il. Il refusera néanmoins de nous donner les noms des colonels de l’époque qui seraient les auteurs des détournements des frais de missions des soldats de la MISAB. Très déçu de son passage dans l’armée Le cas du soldat Dargani pourrait être le prototype de ce qui a conduit au malaise actuel dans l’armée burkinabè. Actuellement admis à la rétraite dans les conditions très contestées qu’il appelle « les 4 ans », l’ex soldat en veut fortement aux méthodes de fonctionnement dans l’armée burkinabè. L’affaire des « 4 ans » fait référence à un décret de mars 2004, par lequel le gouvernement a repoussé de 2 à 5 ans les limites d’âge de la retraite des agents de la Fonction publique. Les militaires avaient revendiqué sans succès que l’âge de départ à la retraite des militaires soit repoussé de 4 ans et que soit payée l’indemnité de départ des militaires, en retraite depuis 2006. C’est très amer que le soldat Dargani est allé à la retraite en 2008 sans avoir « rien » gagné, selon lui. Il est en effet sorti avec le rang de soldat de 1ère classe. Il a pourtant servi pendant 13 ans à l’Etat-major. Il n’a pas obtenu d’avancement tout simplement parce que sa hiérarchie ne l’a pas voulu. Pour Dargani, ceux qui ont le contrôle de l’armée n’aiment pas qu’on leur dise la vérité. Et tant pis pour des gens comme lui qui se sont entêtés. Mais aujourd’hui l’ex-soldat Dargani se réjouit que la vérité éclate à travers les manifestations au sein de l’armée. Lesquelles manifestations ont entrainé des mouvements au sein des commandements. « Ce qui a été fait est bien mais ce n’est pas encore fini. Il reste toujours des colonels qu’on doit mettre à l’écart. Le président doit ouvrir l’œil », fait-il remarquer. A en croire Dargani, ceux qui les ont brimés dans l’armée sont aujourd’hui pris dans leur propre piège. « Ils règnaient par la terreur. C’est parce qu’ils voulaient nous faire taire qu’ils ont inventé cette histoire de 4 ans pour nous envoyer à la retraite sous le prétexte que nous sommes vieux. Ils sont allés prendre les jeunes et ce sont ces jeunes qui vont les amener à la raison », confie Dargani. Pour l’ex-soldat en voie de se rebeller, si eux, étaient « des moutons » à leur temps, c’est-à-dire « idiots et suivistes », les jeunes soldats d’aujourd’hui sont eux « des chèvres », c’est-à-dire « têtus et des durs à cuir ». Les jeunes soldats arriveraient dans l’armée avec des diplômes plus élevés qui vont au BAC et plus. Ils seraient mieux informés et n’ont pas peur d’être sanctionnés. Aujourd’hui ils ont ouvert la voie que les soldats de la MISAB prévoient de suivre pour satisfaire leurs revendications. Samba Bila Rappel sur la MISSAB Pour mémoire, en 1996, la République centrafricaine a été secouée par une crise politico-militaire ponctuée par trois mutineries successives d’éléments des forces armées centrafricaines, qui s’expliquaient dans une large mesure par un mécontentement, assez répandu dans le public, suscité par des problèmes sociaux et économiques exacerbés par le non-paiement prolongé d’arriérés de solde. Profondément préoccupée par la dégradation de cette situation et par ses conséquences pour la région, et en raison de la demande formulée par l’ex-président Ange-Félix Patassé, la dix-neuvième Réunion au sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de France et d’Afrique, tenue en décembre 1996 à Ouagadougou, a demandé aux présidents gabonais, burkinabè, malien et tchadien de se rendre à Bangui pour négocier une trêve entre les forces loyales au Président Patassé et les mutins, trêve qu’ils ont réussi à obtenir après d’intenses négociations. Le 25 janvier 1997, les parties ont signé les Accords de Bangui qui incluaient les éléments nécessaires à un règlement global de la crise. Un comité international, composé d’un représentant de chacun des quatre chefs d’Etat concernés a été créé pour suivre l’application des Accords. Soutien logistique et financier de la France Conformément aux termes de l’accord conclu lors de la Conférence de concertation et de dialogue tenue à Bangui du 11 au 16 janvier 1997, et en réponse à une lettre de l’ancien président centrafricain Ange Félix Patassé datée du 27 janvier 1997, les chefs d’Etat gabonais, burkinabè, malien et tchadien ont décidé de créer, à compter du 31 janvier 1997, une force interafricaine en République centrafricaine (MISAB). Par la suite, l’initiative de ces quatre pays sera renforcée par le Sénégal et le Togo. Son mandat visait à rétablir la paix et la sécurité en République centrafricaine par la surveillance des Accords de Bangui et par des opérations de désarmement des anciens mutins, des milices, et des autres individus illégalement porteurs d’armes. Le 8 février 1997, la MISAB a été déployée à Bangui ; elle était composée au total de 800 militaires fournis par le Burkina Faso, le Gabon, le Mali et le Tchad, puis par le Sénégal et le Togo, et placée sous le commandement militaire du Gabon avec le soutien logistique et financier de la France. Le premier contingent burkinabè était fort de 150 hommes tout comme les deux autres qui suivront. A part les contingents togolais dont ils n’ont pas pu avoir des informations fiables sur le traitement qui leur a été réservé à leur retour, les militaires burkinabè ont pu avoir des informations claires sur les autres contingents de la MISAB des pays de la sous-région qui étaient soumis au même traitement qu’eux en République Centrafricaine. Selon les renseignements reçus, ils auraient perçu des traitements similaires à ceux des contingents de la Mission des Nations unies en République Centrafricaine (MINURCA) qui a été déployée dans ce même pays après la fin de la mission de la MISAB. Selon les informations reçues, les contingents de la MINURCA, après leur retour de mission, auraient empoché chacun la coquette somme de 8 millions de Fcfa. Comparé au traitement reçu par la MISAB, les inégalités sont nettes pour la même mission dans le même pays. La différence entre les deux missions, c’est que le financement de la première était assuré par la France et celui de la seconde par les Nations unies. La MISAB a été obligée d’écourter sa mission avec le retrait de la France en avril 1998. Comme des efforts certes avaient été accomplis dans le désarmement sans qu’une paix véritable ne soit de retour en Centrafrique, les Nations unies avaient, elles aussi, décidé de prendre la relève de la MISAB à travers le déploiement d’une force pour finaliser la pacification du pays. Presque tous les pays qui avaient envoyé des militaires pour constituer la MISAB, avaient décidé, sauf la France, de contribuer à la mission des Nations unies. C’est à la fin de toutes les missions que les contingents de la MISAB se sont rendus compte de l’inégalité des traitements. L’Indépendant


14/08/2011
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