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Prise en charge des PVVIH : Ruptures de réactifs, appareils en panne, les malades en danger

Prise en charge des PVVIH : Ruptures de réactifs, appareils en panne, les malades en danger


 

Le Burkina Faso compte 150 000 sero positifs dont 33282 sous traitement ARV au 30 juin 2011. La prise en charge médicale et biologique de ces personnes se détériore ces deux dernières années. On déplore de fréquentes ruptures de réactifs servant à réaliser les examens biologiques. Des appareils tombent régulièrement en panne. Les malades souffrent. Que se passe-t-il dans les structures chargées de gérer cette question ? Nous avons enquêter plusieurs mois dans le milieu.

Mme Sanogho a été dépistée il y a quelques mois dans son quartier de Kossodo. Le résultat s’est révélé positif. Pour des raisons de confidentialité, elle ne veut pas se faire soigner au Centre médical de son district. Elle s’est donc déplacée au CMA du secteur 30. C’est ici qu’elle souhaite être inscrite comme patiente et pouvoir bénéficier des services de prise en charge. Au mois d’août, ils sont 2005 personnes vivant avec le VIH (PVVIH) à être suivies dans ce CMA. Ces PVVIH constituent ce qu’on appelle dans le jargon "la file active". Mme Sanogho est donc inscrite dans la file active du CMA. Mais il lui faut faire des examens biologiques. Ces examens sont nécessaires pour savoir si elle doit être sous ARV ou pas. Les ARV sont des médicaments dont la prescription exige entre autres la connaissance des molécules, de leurs effets secondaires et des combinaisons thérapeutiques.

Le traitement par les ARV vise évidemment à augmenter la durée de vie, à améliorer la qualité de vie, à restaurer l’immunité, à diminuer le risque de transmission du VIH etc. Mais l’examen biologique au CD4 qu’elle devait faire n’aura pas lieu par manque de réactifs au laboratoire. Or le CD4 est un examen incontournable et la rupture dure depuis une semaine. Ce n’est pas la première fois qu’il manque de réactifs dans ce CMA. D’autres patients en ont fait l’amère expérience il y a quelques mois. Les ruptures sont fréquentes et peuvent durer de quelques jours à plusieurs mois. La plus longue rupture a été enregistrée au début de l’année. De janvier à avril, il était impossible de faire certains examens au CMA parce que le stock de réactifs était épuisé. La même situation est observée dans presque tous les centres publics de soins. Les patients qui ne peuvent pas patienter sont obligés, pour ceux qui en ont les moyens, d’aller dans les cliniques privées faire leurs examens.

Le seul examen CD4 coûte entre 3000 et 10000 f cfa selon les cliniques. La plupart des malades consultent dans le public parce qu’ils n’ont pas les moyens. En moyenne, au CMA du secteur 30, il y a entre 5 à 10 patients par jour qui viennent pour solliciter des examens. Au CMA de Pissy, ils sont encore plus nombreux, entre 25 et 30. Le district de Pissy est le plus peuplé de la capitale. Sa file active est estimée à près de 5000 personnes. Toutes ces personnes ont besoin d’un suivi médical et biologique adéquat. Ce sont les examens faits dans les délais prescrits qui peuvent aider à mieux diagnostiquer et à adapter le traitement. Quand il y a rupture de réactifs d’un de ces examens, surtout celui du CD4, qui est incontournable selon les spécialistes, c’est toute la chaîne de suivi du patient qui est affectée.

Pourquoi alors y a-t-il autant de ruptures dans les centres publics alors que dans le privé, les mêmes réactifs sont disponibles ?

Dans le milieu des associations des PVVIH, certains sont convaincus qu’il y a détournement de réactifs destinés aux structures publiques au profit des cliniques et centres privés. Leur conviction se base sur deux faits : d’abord, la situation n’est pas nouvelle. Il y a plusieurs années qu’on déplore les ruptures. Ensuite, on connait le besoin annuel national en réactifs en ce qui concerne les examens spécifiques des PVVIH. Au 30 juin 2011, ils étaient 33282 sous traitement ARV. Le Burkina compte à peu près 150 000 personnes infectées par le VIH. Les prévisions permettent donc d’anticiper les besoins et de rendre disponibles les produits à temps. Si la situation perdure, soit les personnes chargées de ce volet sont incompétentes, soit il y a des gens qui y trouvent leur intérêt. A quel niveau peut se situer le problème ? Est-ce au niveau des CMA ou au niveau du Comité interministériel de lutte contre le sida (CMLS) chargé d’approvisionner ces structures ? Nos sources penchent plutôt du côté du Comité interministériel, même si elles n’écartent pas l’hypothèse de quelques " sorties" de réactifs dans les CMA. Elles rejettent la faute au niveau supérieur, ceux qui sont chargés de faire les commandes. C’est à ce niveau que les réactifs de CD4 qui sont fournis gratuitement par l’Etat grâce au Fond mondial prendraient une autre destination.

Les CMA dégagent toute responsabilité

Au niveau des responsables des CMA, on préfère plutôt pointer la faiblesse de la subvention et les retards dans l’approvisionnement. "Nous faisons une programmation trimestrielle par rapport aux réactifs. Mais il peut arriver que les réactifs finissent avant la fin du trimestre. Nous signalons au Comité interministériel. Souvent, il peut s’écouler beaucoup de temps avant que la commande n’arrive. Pendant ce temps, nous sommes obligés de référer les patients ailleurs.", explique Dr Wilfried Ouédraogo, le médecin chef du district (MCD) du CMA du secteur 30. Un autre cas où les patients doivent aller voir ailleurs, c’est quand ils ne sont pas assez nombreux pour demander les examens. "On a un appareil qui prend 24 examens en même temps. Même si c’est une personne qui demande, vous êtes obligés de mettre 24 réactifs. Ce qui n’est pas judicieux. Quand c’est donc une personne, on préfère le référer ailleurs pour ne pas gaspiller les réactifs.

Pour ne pas trop discuter avec la personne, on lui dit qu’il y a rupture de réactifs.", avoue un agent. Au CMA de Pissy, la situation semble sous contrôle. "Depuis le début de l’année, nous avons eu une seule rupture de réactifs CD4 qui a duré un mois.", affirme Mme Karambiri Korotimi, responsable du laboratoire. Son MCD, Dr Jean Charlemagne Kondombo soutient également que la situation se normalise peu à peu. "Après le départ de Médecins Sans Frontières (MSF) en 2009, notre CMA est resté plusieurs mois sans pouvoir faire des examens alors que nous avions le plus grand nombre de patients dans tout le pays. Les ruptures de réactifs ainsi que les pannes d’appareils étaient fréquentes. Depuis mars 2010, nous avons tout repris. Chaque fois que le laboratoire me signale qu’il y aura rupture dans les jours prochains, j’appelle directement Dr Sanou du CMLS/Santé et je ne le lâche pas tant que je ne suis pas satisfait." Le CMLS/Santé serait-il alors l’unique responsable des ruptures constatées au niveau des districts ?

Le CMLS/Santé mis en cause

Au niveau central, c’est la cellule de coordination du Comité ministériel de lutte contre le sida du ministère de la Santé (CMLS/Santé) qui est la structure responsable de la coordination de la prise en charge médicale de l’infection à VIH. Elle a pour attribution entre autres d’estimer et de valider les besoins exprimés par les structures de prise en charge médicale, en équipements, en médicaments et en réactifs essentiels. Dr Jean Marie Sanou en est le premier responsable. Quelle est le degré de responsabilité de sa structure dans les dysfonctionnements constatés dans les CMA ?

D’abord, il minimise l’ampleur des ruptures de réactifs CD4 et de charge virale qui sont des examens spécifiques aux PVVIH. Il estime que son service fait tout pour rendre ces réactifs disponibles dans les structures publiques dans un délai raisonnable. " Mais il arrive que les structures ne nous signalent pas tôt qu’il y a rupture. Leurs requêtes arrivent tard", explique Dr Sanou. Pour les autres examens, " il n’y a pas de dotation particulière pour les PVVIH. Quand on fait une dotation de réactifs, c’est pour tout le monde. C’est à ce niveau que les ruptures sont signalées souvent. C’est très souvent une question d’organisation. Certains n’anticipent pas." Il assure que son service ne reste pas inactif quand il a connaissance des cas de rupture : "Nous avons mis en place un système d’évaluation trimestrielle et personnellement j’appelle régulièrement les responsables des structures sanitaires pour avoir l’état de la situation. Quand ces derniers me signalent des ruptures, nous sommes tenus de faire des appels d’offre pour lancer la commande. Cette procédure fait que souvent la disponibilité n’est pas assurée à temps." Au niveau des CMA, on affirme que le CMLS ne fournit que les réactifs de CD4. Pour les autres réactifs, c’est sur fonds propres qu’ils les acquièrent.

Dans les centres gérés par les Camilliens, l’Etat fournit 50% des besoins en réactifs. L’autre moitié est assurée par une ONG italienne Medicus Mondi italia. Plus de 1500 personnes sont suivies dans ces centres. Elles bénéficient gratuitement de tous les examens prévus dans le Protocole national. Mais depuis six mois, les réactifs de l’Etat ainsi que les médicaments des maladies opportunistes n’arrivent plus. "Grâce à notre partenaire, nous arrivons à fournir les réactifs, mais pour les médicaments, ce n’est que tout récemment que le problème a été résolu.", déclare Dr Pietra. Pendant six mois, il ne pouvait pas mettre les nouveaux cas sous ARV à cause du manque de médicaments. "Aujourd’hui encore, des malades tapent chaque jour à notre porte. Ils viennent des structures publiques. Mais je ne peux pas les accepter dans notre file active car nos moyens ne nous permettent pas. Nous suivons et assurons la gratuité uniquement pour ceux qui sont dépistés dans nos centres de soin", explique Dr Pietra.

Au niveau du Fond mondial, le coordonnateur du programme, Dr Wamarou Traoré estime que les causes des ruptures sont de divers ordres. La première raison, c’est la faiblesse des fonds alloués à l’achat des réactifs. Pour le financement qui vient de prendre fin (ce mois de septembre), le comité national chargé de rédiger la requête du Burkina avait demandé au Fond mondial de financer 30% des besoins en réactifs en 2006. " Notre priorité à l’époque, c’était la fourniture des ARV. Pour les réactifs, le comité a misé sur l’appui des autres partenaires nationaux et internationaux pour couvrir les 70% restants. Malheureusement, ces derniers n’ont pas assuré. ", soutient Dr Traoré. La deuxième raison, c’est le retard des décaissements. Le mécanisme au niveau du Fond mondial à Genève (Suisse) est très exigeant sur les justificatifs. Malheureusement, estime le coordonnateur, "au niveau périphérique, les rapports n’arrivent pas à temps pour nous permettre d’acheminer rapidement". Mais les ruptures de ces derniers mois ne seraient pas liées aux retards d’acheminement des rapports. "Notre programme est en phase terminale le 30 septembre. Nous allons entamer un nouveau programme en octobre. Nous sommes donc dans une phase transitoire où on ne pouvait pas engager des dépenses pour satisfaire la demande en attendant le décaissement du Fond mondial. Malheureusement, au niveau de l’Etat non plus, il n’y a pas eu de relai pour continuer à assurer la disponibilité des réactifs. Si on te lave le dos, lave-toi au moins la figure." En dehors des ruptures de réactifs, les malades sont également confrontés aux pannes fréquentes des appareils servant à faire les examens.

L’Etat ne s’occupe pas de la maintenance

Qu’en est-il des appareils en panne qui restent plusieurs mois, voire des années sans réparation ? L’Etat a doté les structures publiques de 159 appareils de CD4. Leur répartition n’est pas très homogène dans le pays, reconnait Dr Sanou du CMLS. Ils sont concentrés dans les principales villes dont la capitale où les PVVIH sont les plus nombreux. Dans les deux CMA les plus fréquentés de la capitale, tous les appareils ne sont pas en bon état. Au CMA de Pissy, il y a un appareil qui est en panne depuis septembre 2010. C’est l’appareil offert par Médecins Sans frontières (MSF) qui a dirigé un projet pilote de prise en charge entière des malades de 2003 à 2009 dans ce district. Le laser de l’appareil a lâché et il faut le remplacer. Il coûte des millions et le CMA n’a pas les moyens. Déjà les fonds propres ne suffisent pas pour acheter les réactifs, les consommables et faire la maintenance des appareils.

Finalement, c’est le CMLS qui s’est décidé à acheter le laser. Il est arrivé en juillet dernier. Mais il n’était pas installé. Au CMA du secteur 30, il y a également un appareil en panne. Le district n’a pas les moyens pour le réparer. Il n’y a pas longtemps, au quatrième trimestre de 2010, il avait déboursé 800 000 f cfa pour régler la facture de la réparation d’un autre appareil. "L’Etat ne donne rien pour l’entretien des appareils. L’Etat nous donne à peu près 90 millions par an et dans ce budget, il n’y a pas de ligne affectée à la maintenance. C’est le PADS qui nous donne 2 millions pour des entretiens biomédicaux. C’est déjà bien, mais c’est insuffisant pour l’ensemble du district qui, je vous rappelle, a le plateau technique le plus fourni après Yalgado. Nous avons les capacités d’un CHR, mais nos moyens sont ceux d’un CMA ordinaire. Nous couvrons également plusieurs villages avec des CSPS qui ont des besoins énormes", souligne Dr Wilfried Ouédraogo.

Dans les CMA, les agents du laboratoire sont confrontés à un autre problème : ils reçoivent des appareils qui ne lisent pas certains réactifs. Ou bien ils ne sont pas formés à la manipulation de ces appareils. Pourquoi ne pas doter toutes les structures des mêmes appareils pour éviter ce genre de problème ? Au CMLS, on avance l’argument de la concurrence. Si on spécifie le type d’appareil à acheter, on risque de se retrouver avec un seul fournisseur, celui qui représente la marque au Burkina. Ce qui serait contraire aux recommandations des bailleurs. En tous les cas, la fréquence des pannes des appareils alimente des soupçons sur leur qualité. Respecte-on les références des équipements recommandées par l’OMS quand on lance les appels d’offre ? Beaucoup de laborantins ne sont pas convaincus. Ils ont l’impression qu’on leur fourgue des appareils de seconde main. " Les appareils ne tardent pas à tomber en panne.

On se demande souvent si ce sont de bons appareils qu’on reçoit. On peut comprendre qu’il y ait de petits problèmes, mais de grosses pannes qui nécessitent de débourser un million pour la réparation, c’est vraiment incompréhensible pour des appareils neufs. ", se plaint un laborantin. Dr Sanou du CMLS soutient, quant à lui, que les appels d’offres se passent dans les règles de l’art. Les appareils livrés seraient également de bonne qualité. Il pointe plutôt du doigt la qualité technique de ceux qui manipulent les appareils : "Nous recevons des appareils de différents types et les techniciens de labo sont formés en fonction des appareils à leur disposition. Quand ils sont affectés dans une autre structure, il peut arriver qu’ils trouvent sur place des appareils dont ils ne connaissent pas bien la manipulation. Cela peut expliquer certaines défaillances." Cette explication suffira-t-elle à dissiper les mauvaises langues qui affirment que les bons appareils se retrouvent plutôt dans les cliniques privées ? "Quand un patient part dans le public et qu’on lui dit que l’appareil est en panne et on le réfère vers une clinique privée, il ne faut pas lui demander de ne pas penser à une combine.

Cela est normal. Mais très souvent, ces rumeurs ne sont pas fondées. L’explication est que Les privés gèrent mieux leurs appareils que les structures publiques.", se défend un médecin opérant dans le privé. Ce qui est certain, les pannes sont criardes dans le public et cela dure depuis des années sans qu’on ne trouve de solutions. Les responsables mettent cet état de fait sur le compte du déficit de financement du Programme lutte contre le sida. Depuis 2009, le financement de la lutte contre le sida s’amenuise. L’Etat serait obligé de rechercher des ressources additionnelles pour faire face aux besoins. En attendant, chaque structure doit se débrouiller pour assurer le bon fonctionnement des appareils.

"Nous demandons la gratuité des examens"

Les ARV sont gratuits depuis 2010 au Burkina. Mais cette gratuité est souvent une fiction. Les médicaments des maladies opportunistes sont en fréquentes ruptures dans les centres de santé. Pour les examens biologiques, de nombreux malades manquent de moyens pour se faire examiner. La question sur toutes lèvres, c’est : A quand la gratuité des examens biologiques ?

Dans "Normes et protocoles de prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH au Burkina Faso", une sorte de bréviaire, l’examen au CD4 est décrit comme essentiel. Il permet de déterminer le taux à partir duquel le médecin recommande la mise sous ARV. Pendant le traitement également, le traitant a besoin de savoir l’évolution de l’état du malade et pour le savoir, il faut encore passer par l’examen au CD4. Les résultats vont orienter le médecin sur les molécules à prescrire au malade. Au regard donc de son importance, l’Etat subventionne cet examen. En principe, il est gratuit. Mais dans les faits, les patients doivent débourser entre 3000 et 10 000 f cfa selon qu’il part dans une structure publique ou dans les cliniques.

Dans les CMA du 30 et de Pissy, il coûte 3000 f cfa. A l’hôpital Yalgado, il est encore plus cher : 5000 f cfa. De nombreux malades n’ont pas l’argent pour payer. Leurs bulletins d’examens dorment à la maison. Le rendez-vous avec le médecin n’est pas respecté. Certains ont peur de se présenter devant le docteur sans les résultats. Mais ils craignent surtout pour leur état de santé : "J’avais accouché il n’y a pas longtemps et je n’avais pas l’argent pour faire les examens. J’avais très mal. Il a fallu trois mois pour que je fasse l’examen avec l’aide de REGIPIV. Depuis 2010, je ne faisais plus d’examen par manque de moyens. J’ai deux enfants dont un bébé. Il faut leur trouver à manger. Mon mari est également séropositif. Il est mécanicien. Il n’a plus beaucoup de force pour aller tous les jours à son atelier. Nos moyens sont donc très limités pour payer les frais d’examens. Notre priorité, c’est trouver à manger.", témoigne Anne Marie. Samira est étudiante à l’université de Ouagadougou. Elle peine également à faire ses examens : "Mon médecin m’a demandé de faire trois examens. Ils coûtent 7000 f cfa. J’ai reçu l’ordonnance depuis avril, mais je n’avais pas les moyens. C’est en juin que j’ai eu l’argent pour faire deux examens. C’est Mme Barro de AEM qui m’a aidé à faire le premier examen et le deuxième, je me suis débrouillée… quand je suis allée pour faire cet examen, malheureusement pour moi, il y avait rupture de réactifs. J’ai dû patienter quelques jours. Pour le troisième examen, j’attends que le Foner tombe.

" Nous l’avons revue en août et elle avait pu faire son troisième examen. Mais au début septembre, son médecin lui a demandé de faire un autre examen. Elle est dans le dilemme : "Quand on prend les médicaments, on a faim. Ils donnent envie de manger alors qu’on n’a pas l’argent. Il faut en plus faire des examens. Tu es donc sommé de faire le choix entre la nourriture et les examens. Le choix n’est pas facile parce que quel qu’il soit, c’est ta santé qui prend un coup." Elle est orpheline depuis 1996. Ses deux parents se sont suivi "mystérieusement" dans l’autre monde. C’est en 2005 qu’elle a fait le test qui s’est révélé positif. Elle prenait juste le cotrimoxazole jusqu’en 2011. Des cas sociaux de ce genre, il y en a beaucoup dans les associations. Ce sont surtout des femmes sans emplois qui sont les plus concernées. Certaines sont sans soutien. Mme Gnegnin mendie devant un CMA pour subvenir à ses besoins primaires et aussi pour faire ses examens. "Je suis sous ARV depuis 2008. Mon mari est gardien. Il ne m’aide pas du tout.

Il a refusé de faire le test alors qu’il est tout temps malade. Comme il est régulièrement couché pour cause de maladie, il n’est pas bien payé. Je vendais donc du charbon pour survivre, mais ça ne marche plus. Aujourd’hui je mendie devant le CMA pour avoir de quoi manger et apporter un peu à la maison. Nous avons 5 enfants et aucun ne travaille." Elle nous montre son ordonnance où il est prescrit deux examens : le NFS et le CD4. "Les deux examens font 4500 f cfa, mais je n’ai rien.", avoue-t-elle. Devant ces situations de détresse, les centres médicaux ont mis en place un système de prix forfaitaire pour un certain nombre d’examens fréquemment demandés aux PVVIH/sida. Pour un ensemble de 5 examens dont le CD4, le patient paie 5000 f cfa. Le procédé est favorable pour ceux qui sont dits "tolérants" à leurs médicaments. Ce qui n’est pas le cas chez tous les patients qui, pour diverses raisons, doivent faire un ou deux examens pour réadapter leur traitement. Ceux-ci sont obligés de payer le tarif "normal". Les services de l’Action sociale ne désemplissent pas.

Ils arrivent à soutenir un petit nombre. Pour le reste, c’est la compassion. "Face à certains cas pathétiques, c’est nous-mêmes les agents qui mettons les mains à la poche car le service n’a pas de caisse menu dépenses, encore moins pour le soutien aux patients. Il n’y a pas non plus de stock de médicaments pour les cas d’urgence", souligne Hermann Dabira du service Action sociale du CMA du secteur 30.

Idrissa Barry

L’Evénement



03/10/2011
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