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Armée de l’air : Un achat d’avions de chasse qui fait jaser

Armée de l’air : Un achat d’avions de chasse qui fait jaser

vendredi 28 octobre 2011

Malgré une période de vaches maigres marquée par un déficit pluviométrique qui fait déjà crier famine, l’Armée burkinabè aurait quand même acheté des avions de chasse dont le coût serait estimé à 10 millions de dollars, environ 5 milliards de francs CFA, l’unité. C’est ce que révèle l’hebdomadaire panafricain Jeune Afrique dans un billet paru fin septembre. Depuis que ce lièvre a été levé, des langues trop pendantes en parlent tout en lorgnant les colonnes des canards pour y voir une véritable enquête sur le dossier. Mais rien n’a pointé. Dans les chancelleries, on imagine que ce dossier brûlant a été faxé dans toutes les directions. Mais cela n’a pas éclairci le mystère et la boule de gomme qui enveloppent cette affaire d’achat.

En attendant que la grande muette se décide enfin à briser la glace -ce qui est fort peu probable-, force est de reconnaître que l’info mérite quelques questions d’usage. A quoi devraient donc servir ces « avions d’attaque au sol » que le ministère de la Défense se serait décidé à acquérir au profit de l’Armée de l’air ? Quel péril (réel ou virtuel) pourrait justifier un tel équipement que l’on décrit, avec force détails, comme « des appareils à hélice, équipés de deux mitrailleuses de 12,7 mm, capables d’embarquer 1,5 tonne de charges offensives (bombes, roquettes et missiles) » ?

Une analyse de l’arsenal -avec bien sûr un regard de profane- montre qu’il ne s’agit probablement pas d’une acquisition de routine. En tout cas, un tel matériel militaire ne devrait pas être destiné simplement à l’entraînement ou à la dissuasion. Ne dit-on pas que « qui veut la paix prépare la guerre » ? Sauf que dans le cas du Faso, on ne voit pas vraiment d’où vient ou peut venir la menace. Surtout que ces dernières années, le Blaiso national s’est plutôt taillé un joli costume de « faiseur de paix » qui semble bien lui aller. Ses hauts faits en matière de retour de la paix ou de fin de la guerre au Togo et en Côte d’Ivoire continuent d’être cités en exemples par les institutions internationales et régionales, et aussi de lui valoir des compliments peu flatteurs. Facilitateur en chef du dialogue direct entre les Ivoiriens, il continue de maintenir son représentant au bord de la lagune Ebrié.

Preuve que sa contribution à la pacification totale de la Côte d’Ivoire demeure d’actualité. D’où la question de savoir ce qui peut donc pousser un « apôtre de la paix » aussi convaincant au niveau sous-régional à s’armer aussi chèrement, surtout en cette période de vaches maigres au Faso. C’est la grande question qui mérite d’être posée à qui de droit. Seulement voilà.

Depuis le dernier remaniement ministériel, le sinistre de la Défonce et le Blaiso national ne font plus qu’un. Même si on imagine des confrères fouineurs brûler d’envie d’aller dénouer les ficelles de cette affaire, ils auront peu de chance d’avoir un interlocuteur vraiment prêt à répondre. Ce qui ne dédouane pas nécessairement de la nécessité de connaître la vérité sur ce dossier puisque, selon la piste donnée par Jeune Afrique, le vendeur des avions de marque Super Tucano (A-29B) ne serait autre que le constructeur brésilien Embraer.

Il a donc suffi d’interroger quelques sources proches du constructeur pour savoir que « un des trois premiers Super Tucano portant numéro de série militaire XT-MEA a été livré à l’Armée burkinabè au cours d’un vol de nuit à partir de l’aéroport de Recife-Guarapes au Brésil, le 8 septembre 2011 ». On trouve même des photos de l’avion de chasse. Des images probablement prises par un bidasse paparazzi sur la piste de la base aérienne de Koulouba.

En clair, les trois avions de chasse ont été effectivement réceptionnés par l’Armée de l’air. D’autres sources la confirment en ajoutant que l’achat de ces avions serait justifié par une nécessité de modernisation de la flotte de l’Armée de l’air qui n’aurait jusque-là que deux unités de MI35 et quatre unités de SF.260 W pour « des missions de formation, de liaison et d’attaque légère ». Tout porte donc à croire qu’il s’agirait, sans doute, de l’achat de trois avions et non de six comme l’a indiqué notre confrère Jeune Afrique. Nos recherches révèlent également que le contrat d’achat de ces avions serait fait à « l’improviste ». Autrement dit, ce projet de dépense n’aurait donc pas été quelque chose de largement discuté. Selon une source militaire au fait du dossier, « les chasseurs ont été commandés et approuvés » par Yéro-la-bagarre pendant qu’il était encore sinistre de la Défonce. Par ailleurs, le constructeur brésilien n’aurait pas également « annoncé précédemment le contrat pour ces avions », comme cela est d’usage en la matière.

Difficile donc de savoir sur quelles bases le projet et le contrat d’acquisition de ces avions ont été décidés. Il faut donc poser très rapidement la question au gouvernement soit lors de son désormais traditionnel point de presse, soit lors d’une question orale à l’Assemblée nationale. Ce sera la meilleure façon de dissiper les nuages qui pèsent sur cet achat d’avions de chasse qui fait jaser tant. Surtout dans un contexte économique difficile où les ressources limitées de l’Etat sont tiraillées par plusieurs priorités aussi urgentes les unes que les autres.

F. Quophy

Journal du Jeudi



28/10/2011
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